Prendre place au collège : expériences relationnelles et participation sociale d’anciens élèves présentant une déficience visuelle

Auteurs

DOI :

https://doi.org/10.5077/journals/rihv.2025.e2297

Mots-clés :

Inclusion scolaire, Espaces interstitiels, Participation sociale, Déficience visuelle, Approche compréhensive

Résumé

L’inclusion scolaire ne se réduit pas à l’accessibilité pédagogique : elle engage aussi les expériences sociales et la rencontre avec l’altérité. Les espaces interstitiels — récréations, pause méridienne, inter-cours, couloirs — jouent un rôle central dans la construction des liens entre pairs. Or, si le collège constitue un moment charnière des sociabilités juvéniles, qu’en est-il pour les élèves en situation de handicap — et plus particulièrement pour ceux présentant une déficience visuelle — de leur participation sociale ? Issue d’un travail doctoral, cette étude exploratoire analyse leurs expériences relationnelles et interroge la portée réelle de l’inclusion : abolit-elle les frontières symboliques ou en recompose-t-elle de nouvelles, plus subtiles, entre un « nous » valorisé et un « eux » relégué ? Par ce pas de côté, elle met au jour certaines zones d’ombre de l’inclusion scolaire et invite à repenser une école véritablement tournée vers autrui.

Introduction

Sous l’impulsion d’organismes supranationaux tels l’UNESCO, la question de la scolarité inclusive est au cœur des problématiques éducatives contemporaines. Les préceptes inclusifs essaiment dans différents pans de notre société (école, sport, emploi, culture…) instaurant une manière de penser et de vivre impliquant la participation active de tous les citoyens. L’accueil d’enfants et d’adolescents en situation de handicap dans les écoles s’érige alors en priorité nationale. En témoigne l’augmentation de 35 % d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire, entre 2017 et la rentrée de septembre 2022 (Darrieussecq, 2023).

Permettre la participation sociale active et l’apprentissage de tous les enfants à l’école ordinaire (Hinz, 2002) nécessite de penser le processus d’inclusion dans son acception originelle. Étroitement liées, ces deux missions doivent pouvoir exister conjointement dans le temps et dans les espaces scolaires (Mazalto, 2017b). Elles conditionnent une école de la « réussite de tous les élèves », le « bien-être », « l’épanouissement » et le respect d’autrui » (MENJ, 2022). Les questions d’inclusion, d’exclusion, de vulnérabilité représentent donc un des enjeux majeurs des politiques publiques en matière d’éducation en France. Pourtant, si la littérature scientifique abonde sur les questions relevant du vécu disciplinaire (Reuter, 2016) peu s’intéressent à ce qui se vit au sein des espaces interstitiels (Delalande, 2001 ; Marciano, 2009 ; Monnard, 2016), tels les temps de récréation, les moments de repas, la pause méridienne, les temps d’inter-cours, les couloirs, le passage d’une classe à l’autre, les toilettes, les abords de l’établissement... pour traiter de l’accueil des diversités dans les écoles. Or, il apparaît que les processus d’inclusion et d’exclusion scolaire se jouent également dans ces espaces relevant du vécu non disciplinaire.

Ainsi, s’il est entendu dans les textes que « l’inclusion signe une appartenance de plain-pied à la vie sociale » (Caraglio, 2019, p.41), sa réalité pratique n’est peut-être pas si opérante. Certes, ces élèves en situation de handicap fréquentent davantage les écoles qu’il y a 20 ans mais que vivent-ils concrètement en ces lieux ? Comment perçoivent-ils leur vie d’élèves ? Si pour beaucoup, ces espaces informels sont possiblement synonymes de plaisir, de liberté, de respiration, de retrouvailles entre pairs… cette réalité est-elle partagée par toutes et tous ? Le lien entre les valeurs inclusives présentées comme idéales et ce qui en résulte pour l’enfant ou l’adolescent mérite d’être étudié car ces imbrications ne vont pas toujours de soi (Bernard, 2009). C’est précisément ce dont nous envisageons de rendre compte dans le cadre d’une recherche doctorale. Pour ce faire, la démarche entreprise et les premiers résultats de cette recherche en cours sont ici restitués.

Cet article se propose, dans un premier temps, de définir les espaces interstitiels et d’en examiner leur rôle dans la dynamique socio-scolaire. Dans un second temps, il met en lumière les apports d’une approche qualitative pour saisir le vécu des élèves dits inclus. Enfin, à partir d’allers-retours constants entre terrain et théorie, dans une démarche inspirée de la grounded theory (Glaser & Strauss, 1995), il interroge la capacité de l’École - et plus particulièrement de ses espaces hors la classe - à rendre possible la rencontre avec l’altérité, et à soutenir, ou au contraire freiner, les processus d’inclusion.

Dans cette perspective, il paraît pertinent de mobiliser le Modèle de Développement Humain – Processus de Production du Handicap (MDH-PPH), Fougeyrollas (2004), qui repose sur une conception anthropologique des droits humains. Ce modèle considère le handicap non comme une déficience isolée, mais comme le résultat d’une interaction entre l’individu et son environnement. Les facteurs contextuels, qu’ils soient personnels ou environnementaux, jouent ainsi un rôle déterminant dans les activités exercées et dans la participation sociale des individus. Cette vision universaliste s’éloigne de la figure du « handicapé malade » et éclaire la manière dont les environnements scolaires - et dans ce cas précis, les espaces interstitiels - peuvent favoriser ou entraver le sentiment d’appartenance et la participation des adolescents à leur communauté de pairs.

De quels espaces parlons-nous précisément ?

Loin d’être monosémique, la notion d’espace scolaire caractérise « l’ensemble des lieux dédiés aux différentes formes d’apprentissages de savoirs et de socialisation de celles et ceux qui les fréquentent » (Mazalto & Paltrinieri, 2013, p.31). L’école française se caractérise par une multiplicité de sous-espaces suivant une organisation standardisée (Hébert, Vigne, Dugas, 2020).

En ces lieux, la forme scolaire perçoit la classe comme espace principal de l’institution. Fermée, elle reste « le noyau central du système éducatif (…) avec ses 35 places rangées en rang d’oignons, c’est l’expression physique exacte du fonctionnement réel du système (…) et l’on peut constater que le seul espace réellement légitime dans l’imaginaire, c’est la salle de classe dans sa variante la plus traditionnelle » (Tournier, 2013, p.44).

Outre cette vision surplombante de la classe, révélatrice d’une manière courante de penser l’École, d’autres espaces cohabitent mais restent régulièrement en marge des programmes de recherche en éducation. Or, chaque collégien traverse dans son quotidien scolaire une multitude d’espaces où son sentiment de bien-être fluctue fortement d’un endroit à un autre (Diener, 1994). Interroger les « à-côtés de la leçon » permet donc d’avoir une vision plus juste des vécus socio-scolaires. En ce sens, ouvrir la discussion sur les processus d’inclusion « hors de la classe » nous parait crucial car révélateur nous semble-t-il d’un certain nombre de points d’achoppement.

Les espaces interstitiels représentent des lieux-temps en marge des activités à proprement scolaires. Des phénomènes de circulations (horizontales et verticales) caractérisent un certain nombre de ces espaces informels. Les couloirs, les escaliers, les passerelles, les rampes, sont des espaces « servants » par excellence, qui rythment le quotidien des élèves, leurs permettant de se rendre d’une salle à une autre, d’un lieu à un autre. Véritables artères de l’espace-temps scolaire, ces espaces de transition sont donc incontournables dans la vie des élèves. Ils leur offrent les occasions de rompre avec l’immobilité corporelle (Mazalto, 2017a) propre à la forme scolaire française pour s’inscrire dans des interactions moins normées. Notons également la présence dans les établissements scolaires d’espaces d’accueils (les halls, les entrées des bâtiments) se définissant comme des lieux de passage pour chaque élève. Par ailleurs, existent des espaces de rencontre (cours de récréation, self, foyer) où l’apprenant y dépose provisoirement son costume d’élève (Monnard, 2016) ; des espaces institutionnels (administration, vie scolaire), des espaces d’intimité (toilette, vestiaire, infirmerie) et des espaces extérieurs périphériques (parvis, arrêt de bus) qui entourent le bâtiment scolaire (Joing, Vors, Llena & al., 2018).

Au sein de ces interstices, à plus grande distance des regards de l’adulte, s’initient bon nombre d’expérimentations vecteurs de liens sociaux, d’interrelations, d’échanges spontanés où la culture des enfants prend corps. Autant de moments propices aux apprentissages « pour la vie et par la vie » chers à Ovide Decroly, tels des supports de ce que Georg Simmel appelle la « sociabilité » [Geselligkeit], « ces processus purs d’association qui sont à eux-mêmes leur propre fin » (Simmel, 1981, p.121). Dit plus simplement, il s’agit de tous les liens qui se nouent et se dénouent, ces actions des uns sur les autres (Paugam, 2023) qui permettent à la jeunesse d’assimiler les règles sociales (Delalande, 2001).

Une fois cela dit, il faut savoir raison garder. L’interstice, espace flou, aux contours mal définis (Fischer, 2011) peut aussi devenir lanceur d’alerte d’une autre réalité moins reluisante en matière d’inclusion scolaire rendant le processus d’inclusion parfois douloureux, inachevé à l’égard de celles et ceux qui le vivent à la première personne (Lansade, 2023), puisque tous les habitants de l’école ne semblaient pas logés à la même enseigne. Alors, telle la face invisible des inégalités, ces marges temporelles de l’école se transformaient aussi en des espaces anxiogènes, « des espaces réservés à certains » (Fischer, 2011, p.167) et interdits à d’autres.

Méthode

L’entretien compréhensif, un outil pour donner voix à ceux qui ne l’ont pas

Considérer l’expérience passée constitue un moyen pertinent pour mesurer les effets d’une scolarisation dite inclusive pour des jeunes en situation de handicap. En questionnant « l’après coup » des vécus sociaux à l’école, il s’agit de rendre compte des bénéfices ou des désenchantements de ces politiques d’inclusions par l’analyse des effets réciproques entre l’environnement scolaire et les individus qui l’animent. Dans cette démarche compréhensive (Kaufmann, 1996), il a fallu considérer pleinement les émotions éprouvées par le sujet face à ses tranches de vie scolaires mobilisées. La méthode de recherche qualitative apparaît comme un outil pertinent pour mettre en visibilité des réalités sociales souvent invisibilisées (Bourdieu, 1993 ; Beaud & Weber, 1997 ; Rosanvallon, 2014) dans le sens où le récit de vie représente « l’un des principaux moyens d’obtenir une forme de reconnaissance dont le déni constitue, justement, le fondement de l’invisibilité sociale » (Beaud et al., 1997, p.15). Dès lors, l’enquête s’est appuyée sur la parole différée de jeunes adultes en prenant en considération la dimension mémorielle de leur expérience socio-scolaire. Pour ce faire, nous avons fait appel à la mémoire, aux souvenirs liés à ce qui fait évènement pour l’individu car assurément nombre de souvenirs réapparaissent parce que les hommes nous le rappellent (Halbwachs, 1997). Il serait erroné de croire que la « mémoire individuelle » est indépendante de l’environnement social du sujet puisqu’elle relève justement d’une construction collective et donc sociale. A ce titre, Paul Ricœur précise l’influence réciproque entre ces deux « manières pour les souvenirs de s’organiser » en mettant l’accent sut la « constitution simultanée, croisée, naturelle de la mémoire individuelle et de la mémoire collective » (2000, p.570). L’homme n’est donc jamais seul quand il pense, quand il se souvient. D’où notre volonté de mobiliser la mémoire sociale nommée « collective » constituée par les références et souvenirs partagés au sein des groupes auxquels appartiennent nos enquêtés.

Dans le prolongement de cette conception, le récit biographique s’impose comme un outil privilégié : il permet d’articuler mémoire individuelle et mémoire collective à travers les évènements, contextes et interactions qui jalonnent l’histoire de vie (Dominicé 2002). Ce choix méthodologique nous a semblé pertinent et cohérent avec notre ambition première : cerner un phénomène social complexe en dépassant la simplification des réalités scolaires (Eccles & Roeser, 2009).

L’attention portée à des publics vulnérables ne relève dès lors pas du hasard. Elle s’inscrit dans une perspective inspirée, notamment, des travaux de Cynthia Fleury, pour qui c’est à partir de l’expérience des plus vulnérables que peuvent émerger de nouveaux des processus relationnels et des conditions de vie plus justes pour tous (Fleury, 2023). Or et c’est peut-être là tout le nœud du problème, de nombreuses études montrent qu’être scolarisé au sein de l’école ne protège pas nécessairement des formes de rejet ou de marginalisation, parfois subtiles (Plaisance, 2013). Partant de ce constat, nous avons souhaité interroger cette réalité en donnant la parole à celles et ceux qui ont vécu de l’intérieur les débuts du processus inclusif. Nous avons pour cela choisi de nous éloigner d’une approche centrée exclusivement sur la classe, qui tend à dominer l’observation du fonctionnement scolaire, afin d’explorer la participation sociale des élèves déficients visuels en contexte scolaire ordinaire, entendue comme un concept multidimensionnel incluant notamment les interactions entre pairs, le sentiment d’appartenance, l’acceptation sociale (perçue et effective) et les amitiés (Koster, Nakken, Pijl & Van Houten, 2009).

Ainsi, pour appréhender finement cette réalité contextuelle restée pour certains silencieuse, nous devions faire preuve autant que faire se peut de tact pour nous rapprocher au plus près du ressenti intime (Marsollier, 2023 ; Prairat, 2022) propre à chaque être interrogé. Le rôle du chercheur dans cette quête de compréhension était alors d’éveiller l’expression d’autrui sur des sujets vifs et personnels et faire in fine émerger « une science de l’autre » (Lamboy, 2014, p.116) par des relances adaptées. A travers cette écoute empathique et authentique nous reconnaissions l’expertise d’usage de l’écouté. Car au fond, qui est plus à même de parler de l’inclusion scolaire que ces personnes, expertes d’usage (Expert est issu du latin expertus, « éprouvé, qui a fait ses preuves ») au sens premier du terme éprouvant quotidiennement les résonnances d’une déficience visuelle (Gardou, 2009). Autrement dit, en dépassant la perspective « adulto-centrée », la démarche consiste à mettre à distance les représentations du chercheur afin de limiter leur influence et mieux saisir l’expérience des adolescents.

Entre mai 2023 et janvier 2024, vingt-cinq anciens élèves du Maine-et-Loire, âgés de 19 à 26 ans et présentant une déficience visuelle, ont partagé, au fil d’entretiens compréhensifs (Kaufmann, 1996), leurs récits et leurs vécus de l’école.

Une fois les paroles recensées, l’analyse a mobilisé l’approche thématique (Paillé et Mucchielli, 2021), laquelle consiste à dégager des mots et des phrases qui se répètent à la relecture des entretiens retranscrits. Ces invariants, loin d’être de simples redondances, traduisent une forme de vérité sociale située (Kaufmann, 1996), révélatrices de logiques d’expériences des participants.

L’analyse a été structurée à partir des six étapes proposées par Braun et Clarke (2006).

  1. Familiarisation : Immersion dans les données (transcription, notes).
  2. Généralisation des codes initiaux : Marquage des éléments significatifs.
  3. Construction des thèmes : Regroupement des codes en patterns conceptuels.
  4. Révision des thèmes : Validation de leur pertinence et cohérence interne.
  5. Définition et nomination : Précision du périmètre et terminologie adéquate.
  6. Rédaction analytique : Intégration des thèmes dans un récit interprétatif

En se rapprochant des expériences humaines quotidiennes l’étude permet d’accéder à une compréhension plus fine des dynamiques sociales et interactionnelles à l’œuvre dans les contextes de vie scolaire. L’analyse des parcours de ces anciens élèves met en lumière des formes de souffrances souvent tues, qui s’expriment aussi dans les silences. Cette dimension sensible du vécu rejoint l’idée de Coulon (2002, p.26) selon laquelle « La vie sociale se constitue à travers le langage : non pas celui des grammairiens et des linguistes, mais celui de la vie de tous les jours », un langage qu’il importe d’apprendre à déchiffrer pour comprendre ce qui se joue dans les relations ordinaires. Quelques verbatims viennent à présent illustrer et approfondir notre propos.

Des propos riches de sens

« S’il ne quittait pas la pièce, il ne manquerait à personne ; les autres enfants l’ignorent » (Clifford, 1963, p.803).

Prendre une place dans l’espace scolaire nécessite pour les élèves de définir, ajuster, entretenir les bonnes distances entre moi et les autres, entre les autres et moi (Besse, 2013). Or, les déclarations tenues par ces jeunes adultes confirment la difficulté à se sentir membre du groupe, à tisser des liens sociaux à l’école. Dans une perspective éthique propre au travail du chercheur, il convient de souligner que notre propos ne vise pas à opposer des réussites et des échecs, ni à adopter une lecture manichéenne du processus d’inclusion. La complexité du réel se traduit par la diversité des trajectoires observées. Certains anciens élèves ayant une déficience visuelle évoquent en effet des parcours scolaires satisfaisants, marqués par des rencontres épanouissantes et le plaisir de vivre l’école. Néanmoins, « le gros de la troupe » (Scheppens, 1997) ne connait pas ces mêmes réussites. La teneur des propos recueillis laisse entrevoir des vécus scolaires semés d’embuches faits d’expériences sociales complexes, inconfortables si ce n’est désagréables. Au sein même de ces « corridors du quotidien » (Fustier, 2014), certains affirment avoir vécu de longs moments d’ennuis, d’attentes interminables, seuls, isolés, coupés des autres. Nous prenons le parti dans le cadre de cet article de nous arrêter sur ces phénomènes de disfonctionnements des liens sociaux conduisant parfois à des phénomènes d’invisibilisation sociale (Barel, 1982).

Être en lien ou ne pas l’être

Les témoignages rapportés par nos enquêtés questionnent explicitement le vécu social lors des temps de récréation et d’inter-cours. Ces espace-temps précis paraissent symptomatiques des difficultés éprouvées à rencontrer autrui au sein des espaces scolaires.

A l’écoute des uns et des autres, nous sommes d’emblée frappés par la récurrence du sentiment de solitude subie dans l’enceinte scolaire. Cette expérience constitue un invariant partagé par une majorité des personnes interrogées.

Par souci déontologique, tous les prénoms utilisés dans cet article ont été anonymisé pour préserver la confidentialité des participants

Léo, présentant une cécité congénitale et âgé de 20 ans exprime en ces mots ses souvenirs de cours de récréation au collège : « Eh ben c’est simple : je m’asseyais sur un banc ou contre un mur et j’attendais que la sonnerie sonne ! Pour être honnête, « je me faisais chier » pendant un quart d’heure. Je restais dehors sur mon tel (smartphone). [Long silence] J’avais rien d’autre à faire… […]. « Ah si j’avais su aller vers les autres… Je me trouvais bête à attendre… »

Investiguer la notion d’invisibilité sociale nécessite de ne pas amalgamer ces moments d’isolements. Si certains semblent choisir ces formes de disparition sociale, d’évaporation (Le Breton, 2015 ; Reverdy, 2020) par protection d’une visibilité forcée, d’autres à l’inverse, subissent et vivent ce sentiment d’indifférence à leur égard dans les interstices de la vie sociale comme une forme de marginalité invisible(Foucart, 2004).

La réalité de vie quotidienne de ces invisibles se trouve alors meurtrie par l’absence de proximité relationnelle, de chaleur humaine, de résonnance (Rosa, 2018) dans l’espace scolaire. Sans contact apaisant (Shankland & André, 2022), ces enfants et adolescents se trouvaient comme « relégués socialement dans la périphérie de la malédiction sociale » (Le Blanc, 2008, p.127).

Sarah en situation de cécité et âgée de 18 ans évoque elle aussi ses « non-relations » à l’école. « Je n’étais pas comme eux […] L’absence de paroles, de contacts, d’échanges c’était lourd au quotidien et ça me blessait… Ce qui me fait le plus de mal c’était cette forme d’indifférence à mon égard. Personne ne me regardait, personne ne m’attendait, personne ne venait vers moi ; personne ne récupérait mon travail si j’étais absente, personne ne m’attendait pour aller manger le midi ». Une fois l’entretien terminé, l’échange se poursuit. Sarah m’avoue à demi-mots avoir fait fréquemment l’impasse des repas du midi lors de ces années lycée pour éviter de se retrouver seule, moment insupportable à ses yeux. Dans cette même veine, les mots de Karim (porteur de troubles visuels dégénératifs entrainant un déclin progressif de sa capacité visuelle) raisonnent encore. « Un de mes profs nous disait que tout le monde devait être inclus ça me faisait rire quand je vois ce qui se passait pour moi. Lui (l’enseignant) il ne se rendait pas compte de ce que je vivais… ».

Ces propos mettent en évidence le décalage vécu par Karim entre les prescriptions d’inclusion et sa réalité concrète en tant qu’élève avec une déficience visuelle. À travers le discours des « inclus », se manifestent aussi des formes de résignations intériorisées, s’apparentant à des injonctions à l’effacement dans les espaces informels de l’école. « C’était comme ça » me dit Julien, présentant des troubles sévères de la vue, d’un ton détaché, « c’était comme ça, on s’y fait… J’ai fini par ne plus faire d’effort pour être en lien avec d’autres, je me mettais dans un coin ! […] (long soupir). Mais bien sûr j’aurai aimé être davantage en lien, discuter avec des camarades. Mais c’était comme ça depuis longtemps… »

Yohann, qui a perdu progressivement la vue au cours de son adolescence, se remémore également les difficultés sociales qu’il a rencontrées à l’école, en marge de la classe. « Scolairement ça allait à l’école mais socialement ça me pesait beaucoup. D’accord j’avais des notes correctes, j’étais plutôt bon en classe. Mais ça ne fait pas tout. Malgré ça, je n’avais plus envie de venir au lycée. Je ne supportais plus d’être seul tout le temps. […] C’est tout le côté social qui ne marchait pas… Je n’avais personne avec qui être lors des temps de récré ou les repas. Personne sur qui compter… ».

Ces présentations de soi (Goffman, 1973), offrent une opportunité d’entrer dans le ressenti intime de cette juvénilité singulière. La question du groupe d’appartenance est aussi un thème émergeant des entretiens.

À l’écoute de certains de ces anciens élèves, des émotions négatives éprouvées sur les terrains scolaires ont donc impacté leur rapport au monde. Sans rapports sociaux collectifs réels, l’être dans le monde (Heidegger, 1986) n’y prend pas véritablement de place. Le sujet devient alors spectateur d’une vie sociale à laquelle il assiste sans y prendre part. Certains se sont donc retrouvés sur « le bord du chemin » comme désaffiliés du champ social (Castel, 1995). « C’est bête à dire, mais je me sentais comme une étrangère quand j’étais au collège », me confia Marine, aveugle de naissance. Ce sentiment de non-reconnaissance a précipité l’arrêt des cours pour cette jeune femme. « Je suis allée jusqu’au bac mais c’était trop pour moi. Quand je repense à toutes ces années-là, c’est clairement pas des moments agréables. Je passais mon temps seule à lire dans mon coin… super hein » !

Pour faciliter la compréhension de notre propos, un rapide éclairage historique s’avère nécessaire. Aborder l’histoire non pas comme une « science du passé », mais comme une « science des hommes dans les temps » (Le Goff, 1997) ouvre une perspective de compréhension des difficultés à s’inscrire socialement dans des groupes de pairs, comme l’ont révélé des entretiens. Se référer à l’histoire de la scolarisation des élèves en situation de malvoyance et de cécité dans le temps offre ainsi un cadre éclairant pour comprendre les réalités contemporaines.

L’enseignement scolaire de cette population ayant une déficience visuelle s’est opéré durant une longue période (tout au long du XXème siècle) dans une forme « d’entre soi institutionnel » par une éducation ségrégative au sein d’instituts spécialisés. Ce séparatisme scolaire fondé sur une approche médico-sociale a guidé l’action publique en matière de mode de scolarisation jusqu’en 1975. Le système éducatif porte donc un lourd héritage de ces représentations défectologiques (Ployé, 2018) qui, malgré les avancées conceptuelles, restent encore symboliquement d’actualité dans nos écoles du XXIe siècle. Soigner tout en éduquant, telle la devise de l’époque, marqua le courant de la médicalisation de l’anormal. Souvent accueillis en internat, ces enfants recevaient alors une formation primaire puis professionnelle (Bernard, 2009).

L’exemple d’un institut d’éducation sensorielle dédié à la déficience visuelle, établissement et service médico-social (ESMS) implanté dans une grande métropole de l’Ouest de la France, et chargé d’accompagner des enfants et adolescents présentant une déficience visuelle illustre de manière éclairante l’évolution des missions assignées à ce type de structure au fil du temps.

D’un fonctionnement d’institution très classique (classe de scolarisation in situ jusque les années 1995), l’institut s’est progressivement transformé et œuvre aujourd’hui dans une logique d’inclusion scolaire et sociale.

Pour point de comparaison, l’établissement dans les années 1990 comptait plus de 150 jeunes en ses murs en internat (du jeune écolier au lycéen). Ces jeunes suivaient donc une scolarité en interne sans contact avec des pairs « voyants ». Aujourd’hui, ces classes en interne n’existent plus. En lien avec les politiques publiques en vigueur l’intégralité des élèves accompagnés sont scolarisés au sein des établissements scolaires de proximité. Pour autant, les réminiscences de ce passé sont à prendre en considération car encore aujourd’hui malgré l’essaimage des scolarités en inclusion, il subsiste quelques établissements scolaires « partenaires » accueillant prioritairement ces élèves rattachés administrativement au Service d’Aide à l’Acquisition de l’Autonomie et à la Scolarisation de l’institut en question. Pour exemple, à toute proximité de cet ESMS, un collège s’est vu être le lieu scolaire historique « intégrateur » d’une partie de cette jeunesse porteuse d’une déficience visuelle. Ainsi, encore aujourd’hui, cet établissement accueille 11 jeunes déficients visuels en classe ordinaire répartis dans les différentes classes de la 6ème à la 3ème.

Cette situation offre donc aux élèves malvoyants et non-voyants une possibilité de regroupement entre pairs au sein même d’un établissement scolaire ordinaire. Certains jeunes faisant expressément le choix du collège en question pour pallier aux difficultés scolaires et relationnelles rencontrées précédemment au cours de leur scolarité.

Pour exemple, Manon porteuse d’une déficience visuelle sévère, bien qu’originaire d’un département limitrophe, fit le choix délibéré de poursuivre sa scolarité au sein du collège proche de l’institut pour retrouver d’après ses dires « d’autres camarades déficients visuels ».

« J’ai demandé à mes parents de me retrouver avec d’autres déficients visuels car l’inclusion scolaire devenait de plus en plus difficile. J’étais la seule dans mon ancien collège à avoir des problèmes de vue, ça commençait à être pesant. Du coup j’ai pris la décision avec mes parents de venir à l’internat (situé dans une grande métropole de l’Ouest de la France) pour plus me retrouver seule au collège ».

Le cas de Manon n’est pas isolé, d’autres réalisent ce même choix, n’hésitant pas à quitter le milieu familial pour rejoindre l’internat de semaine proposé par l’institut d’éducation sensorielle. Prendre en compte cette réalité est important puisqu’elle met en jeu des formes spontanées de « solidarité des éprouvés » (Le Blanc, 2022) se matérialisant notamment par des formes de regroupements entre « pairs déficients visuels » notamment dans les espaces informels de l’école.

Revenons aux adultes avec les mots d’Inès, âgée de 22 ans en situation de cécité :« Au collège je garde des bons souvenirs car on se retrouvait avec les copains de l’internat* [… ]On était H24 ensemble. On avait des points de rdv pour se retrouver !On avait par exemple baptisé un banc sur la cour, on l’appelait « le banc des DV » (Acronyme signifiant personne avec une Déficience Visuelle ; expression couramment employée par ces adolescents pour se désigner). On s’y retrouvait tous dès qu’on pouvait » !

*Certains jeunes déficients visuels viennent de loin, plusieurs heures peuvent séparer le domicile familial de l’établissement médico-social. Les disparités territoriales des services dédiés à la déficience visuelle sont importantes. L’hébergement en internat vient pallier le manque de structures à proximité du domicile de bon nombre de jeunes adolescents. La partie internat agit donc dans un contexte de territoire recours « grand Ouest ». Pour la plupart, l’accueil se fait du lundi soir au vendredi matin. Ils suivent une scolarité dans les établissements de proximité en fonction de leur projet d’orientation.

Une très large majorité des adultes interrogés et ayant vécu une scolarité au contact de « pairs DV » revendiquent l’importance du groupe au sein du collège. Spontanément, ils y décrivent des souvenirs de liens forts les unissant les uns aux autres, des présences rassurantes, bienveillantes, facilitant la vie au collège. Ainsi ces « pairs-semblables » étaient pour certains leurs seules relations entretenues dans l’institution scolaire. En témoignent les dires de Farida : « Ça facilitait les choses d’avoir des copains DV, on était pas tout seuls on formait un groupe. Et c’est vrai que quand tu arrives en 6ème, tu sais tout de suite sur qui tu vas pouvoir compter, c’était rassurant surtout que pour moi c’était pas toujours simple les relations avant ».

Ces propos révèlent l’émergence spontanée d’une « pair-aidance » - un soutien entre pairs - chez les élèves déficients visuels. Tout bien considéré, la déficience visuelle éprouvée collectivement semble fonder une communauté autour de ces épreuves de vie, ces mêmes caractéristiques communes.

Ainsi, cette dynamique de soutien mutuel façonne des liens privilégiés entre pairs déficients visuels au détriment d’ouvertures vers d’autres camarades.

Le choix « communautaire » de l’entre soi

Pour certains de ces jeunes, le dilemme inclusif se vivait donc quotidiennement au sein d’interstices des établissements scolaires. « Ah quoi bon s’ouvrir aux autres puisque j’ai déjà mes copains » ! Les mots de Gérald reflètent à eux seuls le point de vue exprimé par une majorité des personnes interrogées.

Cela soulève dès lors une question centrale : dans un contexte de promulgation massive des idéaux inclusifs, est-ce concevable pour les acteurs de l’école, qu’un élève avec une déficience visuelle se tourne exclusivement vers des jeunes rencontrant les mêmes difficultés, les mêmes pathologies, les mêmes déficiences lors des temps de pauses informels ? Ce repli communautaire dans les espaces de droits communs n’est pas à prendre à la légère. Une partie de cette jeunesse interrogée le revendique exprimant de fait une forme de « solidarité des ébranlés » (Ricœur, 2000). Si ces regroupements « catégoriels » nous paraissent à certains égards antinomiques aux desiderata inclusionnistes prônés par nos sociétés du moment, que répondre à Gérald qui désire simplement passer du bon temps avec ses potes « bigleux » (c’est ainsi qu’une partie de cette jeunesse se surnomme) ?

Que répondre à Kenza qui refuse catégoriquement de se lier aux camarades « voyants » de sa classe ? Au fond ces mantra inclusif ne risque-t-il pas finalement d’entrer en collision avec les désirs personnels d’une partie de ces adolescents au développement atypique ? C’est finalement, toute la teneur du discours de Mickaël, Manon, etc… que de choisir des relations électives (Paugam, 2011, 2023) au sein de l’espace scolaire. Et si à fortiori les espaces hors la classe, étaient choisis pour une majorité d’élèves comme les lieux de l’entre soi ? La réflexion sur ce point est laissée en suspens ici, et sera approfondie ultérieurement à la lumière des récits de vie.

Les travaux de groupe en classe s’invitent à la discussion des espaces informels

Lors de ces temps d’entretiens, un invariant s’inscrivait en filigrane de ces échanges en réaction à la question suivante : « Être assis à côté de camarades ne veut pas dire pour autant être accepté et reconnu comme membre du groupe classe. Je peux être présent à côté des autres sans véritablement être en lien avec eux ». Qu’est-ce que ces mots t’inspirent » ?

Maël : « Direct ça me fait penser aux travaux de groupe en classe. […]  A ton avis, qui était le dernier choisi dans les groupes ? […] Ça ne loupait pas, j’étais toujours le dernier à être choisi. Et le pire c’est que quand tu finis par te retrouver dans un groupe, tu entends les autres soupirer, genre ça me soule qu’il soit avec moi… Et ça quand tu te le prends à chaque fois dans la figure ça fait mal, je te jure… ».

Les mots de Kevin abondent en ce sens confirmant lui aussi la dureté émotionnelle de ces instants précis. « C’est bien simple, en ce qui concerne les travaux de groupe en classe, t’es toujours le dernier choisi, toujours… […] À chaque fois, c’était la même chose, le prof nous demandait de se mettre par 3 ou 4 et comme par hasard, je me retrouvais toute seule.

« Je t’assure c’était dur à vivre », m’avoue Mylène, jeune femme malvoyante, dans un moment de vive émotion. Ainsi, ce sont bien souvent les mêmes qui restent toujours les derniers de cordée, chahutés, isolés, invisibles aux yeux des autres. « Au fond, que je sois là ou pas là, qu’est-ce que ça changeait pour les autres ? », me confie Tim.

Cette question des travaux de groupe m’a été décrite spontanément par 12 de ces 25 adultes sans que je les interroge spécifiquement sur ce point. Nous sortons donc du registre des espaces informels mais n’est-ce pas finalement là une ligne de crête plus systémique à l’échelle de l’école prouvant les difficultés à être en lien pour ces populations à besoin éducatif particulier ? Nous qui souhaitions prendre des chemins de traverse en nous éloignant de l’espace classe, nous y sommes rappelés par les propos de nos interviewés. « C’est comme si personne ne voulait de moi lors des travaux en groupe » me partage Christelle, avec pudeur.

Ainsi, la constitution de groupe de travail en classe crispe l’expérience inclusive pour une large majorité des adultes rencontrés, tel un exemple symptomatique des difficultés à faire sa place dans un environnement scolaire normalisé. Un fort sentiment de n’être pas le/la bienvenu(e) au sein de ces groupes de pairs s’est dégagé à l’évocation de ces moments précis en classe. Certains les qualifieront de moments pénibles, énervants, discriminants… Nous comprenons donc aisément qu’être toléré par le groupe ne signifie en rien une réelle inclusion dans les pratiques sociales de la vie quotidienne.

A cet égard, la réflexion de Jonas prend tout son sens : « Ce que je trouve dommage c’est que les profs ne réfléchissent pas avant au groupe lorsqu’ils nous demandent de nous mettre en groupe de quatre pour travailler sur un projet ! Ça éviterait qu’on se retrouve comme des cons les derniers choisis ». Cette simple remarque somme toute anodine si on n’y prête pas véritablement attention nous prouve la nécessité de penser davantage aux mécanismes relationnels et aux effets qu’ils produisent chez les élèves, notamment ceux les plus vulnérables. Tout porte à croire qu’une anticipation organisationnelle dans ce cas précis, éviterait expérience collective tronquée, stigmatisante se transformant une épreuve sociale humiliante. Ce point sera examiné plus en détail dans la section suivante.

Discussion

Accueillir la parole de ces sujets de droit rappelle la nécessité de ne pas confondre les desseins sociétaux au réel désir de l’être en devenir. Sans quoi le désir du professionnel dominera la parole des principaux concernés. Cette réalité effective du choix mériterait d’être débattue car des dynamiques déséquilibrées adulte/enfant sévissent encore et toujours au sein du système scolaire dit inclusif. Aussi troublant soit-il, cette inversion de perspective (Ossorguine, 2011) nous prouve toute la complexité de la mise en acte de ces incantations à l’inclusion notamment quand elles ne sont pleinement investies par les principaux acteurs. Quoi qu’il en soit, le système scolaire aurait tort de se cacher derrière cette acception qui se traduit in vivo par des « regroupements affinitaires / communautaires » pour se dédouaner de ses missions affiliatrices et émancipatrices qui lui incombe. Tous les élèves qui peuplent l’école ont le droit à la participation sociale y compris les plus vulnérables. Permettre à tout un chacun, quel qu’il soit de développer son agentivité (Frosh, Phoenix, & Pattman, 2002), de vivre positivement les relations aux autres, de se construire comme un citoyen de demain connecté au monde social ne devrait plus être une option. C’est pourtant à l’écoute des uns et des autres une réalité vécue. Les conditions de l’inclusion restent assujetties aux dynamiques d’établissements portées ou non par des acteurs de terrain et de direction. Lorsque certaines communautés éducatives s’engagent « corps et âmes » (Wacquant, 2014) dans des pratiques coopératives rassemblant les diversités, d’autres s’enferment dans des postures désuètes qui n’offrent pas la possibilité de dépasser l’étrangeté du handicap (Ployé et al, 2023).

Là encore, il nous faut raison garder. Qui plus est face à une réalité scolaire très disparate pour cette jeunesse atteinte de troubles visuels. Ce qui se vit au sein de grandes métropoles n’est en rien une réalité nationale. Peu d’agglomérations possèdent sur leur territoire locale un centre d’expertise propre aux déficiences sensorielles. Nombre d’adolescents porteurs de trouble de la vue (hors département de notre contexte cible) décrivent une réalité sociale toute autre, se retrouvant le seul ou la seule élève DV au sein de leur classe (voire de leur établissement), ce qui change considérablement la donne en termes de vécu scolaire.

Tous n’ont pas cette « chance » pour reprendre le propos de Camille de se retrouver entourés de camarades DV au sein des écoles, et ainsi de goûter à un véritable sentiment d’appartenance au sein de leur établissement scolaire.

Ainsi, à l’écoute de ces adultes, l’assignation à résidence identitaire se manifestait en les murs de l’école, au sein même des scènes sociales ordinaires. A cet effet, les temps informels de l’école paraissent donc un puissant révélateur d’un sentiment de désordre relationnel fait d’isolement, de solitude ou d’enfermement auprès de pairs rencontrant les mêmes épreuves de vie. Ces situations de vulnérabilité relationnelle méritent d’être questionnées puis discutées par les communautés éducatives au sens large du terme. Des frontières invisibles dans les espaces sociaux de l’école ont donc marqué le quotidien d’élèves produisant de véritables situations d’exclusion de l’intérieur (Bourdieu et Champagne, 1992) dans des environnements voulus et considérés parfois à tort comme inclusifs. Ces absences de considération sociale à l’égard des plus fragiles questionnent donc la capacité concrète de l’école, à orchestrer la rencontre avec les diversités, à faire vivre de réels espaces affiliateurs pour permettre à chacun de prendre part à la microsociété que représente l’école. Tout porte à croire que l’absence de relations régulières avec autrui a contribué à dessiner, pour une partie de cette jeunesse « hors-jeu » du jeu social, des rapports au mondé tronqués. Pour les plus isolés, la construction identitaire se révèle d’autant plus complexe qu’elle s’effectue en l’absence d’alter ego sur qui compter et de relations interpersonnelles stables et régulières. Cette pauvreté des liens sociaux laisse d’ailleurs des traces. En effet, rares sont ceux qui nous décrivent une fois entrés dans leur vie d’adulte, des relations sociales épanouissantes. Bien au contraire, la majorité des personnes rencontrées exprime pudiquement le peu de contacts amicaux qui les lient à autrui se raccrochant pour la plupart à d’anciennes connaissances qui sont « comme eux », des DV, pour reprendre les mots de Geoffroy.

Tous ces mots recueillis mettent en lumière une réalité moins reluisante des vécus en inclusion scolaire. Souvent passée sous silence (invisible), elle mérite d’être pleinement reconnue dans les pratiques scolaires, « l’adonaissant » (Singly, 2006) se percevant parfois pris en étau entre l’idéologie inclusive et les contraintes concrètes de son environnement. Ces témoignages illustrent les ambivalences d’une école qui, tout en intégrant, peut exclure silencieusement. Ces situations « d’errance relationnelle » (Bresson, 2007) caractérisées par la fragilité voire l’absence de liens sociaux stables ou de reconnaissance dans les collectifs de pairs, témoignent de l’intérêt de porter attention aux vécus non disciplinaires, en particulier dans les espaces interstitiels. Comme le souligne Ebersold (2009), l’inclusion ne peut se réduire à une présence administrative au sein de l’école : elle suppose la possibilité d’en être pleinement membre. L’analyse de ces vécus montre combien les espaces situés en marge de la classe jouent un rôle déterminant dans les processus de socialisation et de construction de liens. Les exclure des réflexions sur l’inclusion revient à occulter les dimensions relationnelles et émotionnelles du bien-être à l’école (Richard et al 2021).

Par ailleurs, la classe est ici, chose originale, abordée par les experts d’usage, non pas d’un point de vue de la simple transmission de savoirs mais davantage à l’aune du climat d’apprentissage voire même du climat relationnel. Cette notion émergente est intéressante car questionne la capacité de l’École à travers ses acteurs à fluidifier les relations entre les élèves pour permettre à tous de résonner ensemble les uns pour les autres et non contre les autres. Il s’agit là d’un enjeu fondamental des métiers tournés vers autrui (Dubet, 2006) : soutenir les élèves pour qu’ils puissent vivre leur scolarité de manière épanouissante et sécurisante. Penser les modalités de regroupement, et plus largement le climat d’apprentissage (Claux et Tamse, 1997), revient à interroger la manière dont la dynamique de groupe peut devenir un levier d’ouverture à la différence et de reconnaissance mutuelle. En effet, un climat d’apprentissage apaisé et inclusif ne se limite pas à la transmission des savoirs : il favorise des relations interpersonnelles fondées sur la coopération, permettant à chacun d’occuper une place reconnue au sein du collectif. Une telle approche dépasse le cadre de la classe pour influencer d’autres espaces – davantage informels – de la vie scolaire, où se rejouent et se prolongent les interactions entre pairs et les mécanismes d’appartenance… Dans cette perspective, l’École se construit comme un lieu de résonnance, où les élèves apprennent à « parler à tous », à mobiliser leurs compétences au service du collectif et, plus largement, à contribuer à un vivre ensemble commun (Manço, 2015).

C’est pourquoi les « manières de faire et d’être » enseignant mériteraient d’être réfléchies pour éviter l’humiliation d’être « le dernier choix », « la dernière roue du carrosse », comme imposé au groupe car à n’en pas douter ces états de « mis au banc de la classe » laissent des traces émotionnelles pour ceux qui le subissent (Zanna & Héas, 2024). Au fond, cette question d’organisation pratique du « faire ensemble » au sein des divers espaces scolaires ne met-elle pas le doigt sur un problème systémique propre à la structure même de l’École Française ? En se centrant massivement sur les savoirs disciplinaires, la communauté éducative n’oublie-t-elle pas le rôle social de l’École ? L’élève a donc besoin de se nourrir d’autrui, de satisfaire ces besoins sociaux (Diener, 1984, Konu & Rimpelä, 2002, Marsollier, 2023), vitaux à sa bonne croissance. « Éduquer c’est é-ducere, c’est conduire un jeune hors de lui-même, le faire exister dans les échanges qu’il vit avec les autres » (Jacquard, 1999, p.66). Ces mots paraissent bien loin des réalités pratiques vécues et racontées par Karim, Sarah, Jonas, etc. Dès lors, interroger le sentiment d’appartenance à l’école est tout aussi important que de se soucier des seuls apprentissages disciplinaires.

Conclusion

« Pour inventer l’école de demain, il faudra aussi à l’avenir penser davantage les espaces qui la font vivre » (Mons, 2017, p.11).

En portant l’attention sur les formes de sociabilité à l’école, notre recherche a interrogé la manière dont les espaces interstitiels contribuent à l’inclusion de tous les élèves. Ces espaces constituent un observatoire privilégié pour comprendre comment les élèves avec une déficience visuelle habitent l’école : comment ils se déplacent, interagissent, s’ajustent aux dynamiques de groupe — ou, parfois, s’en trouvent tenus à distance. À travers cet article, il s’agissait de déplacer le regard hors de la classe, en interrogeant la portée de ces lieux souvent considérés comme secondaires, mais pourtant essentiels, puisqu’ils deviennent le théâtre des relations, des appartenances et des exclusions. Tous ces temps d’attente, de transition ou de respiration peuvent, pour certains, se muer en instants de tension, voire d’anxiété.

Les expériences vécues par nos participants mettent en lumière les difficultés persistantes de l’école à façonner des communautés scolaires ouvertes à tous, à créer du commun entre les élèves (Garel, 2022). Un hiatus demeure entre ce que l’École pense faire (les intentions intentionnelles) et leur traduction concrète dans le quotidien. Si la classe est aménagée, différenciée et dotée d’outils de compensation, qu’en est-il des autres espaces de l’école ? Tout l’enjeu de l’école de demain consiste à compléter les apprentissages formels, disciplinaires en réinvestissant sa mission éducative du quotidien (Bois & Jacquot, 2022). A cet effet, les mots de Gaëlle sont éloquents. « Faut avouer qu’on n’est pas préparé à vivre les autres temps que la classe ». On nous parle toujours du travail scolaire, mais à part ça… Moi j’aurai bien aimé qu’on nous apprenne à aller vers les autres […] Ben les relations ça pourrait s’apprendre je pense. On devrait avoir des cours. Comme des cours de maths ou de Français, mais là pour apprendre à se connaitre, pour discuter des différences et tout. […]  Ouais des cours pour apprendre à discuter tous ensemble et aussi pour comprendre les différences de chacun et pouvoir en parler. On pourrait plus facilement montrer qui on est vraiment. Moi j’aurai aimé ça en tout cas. ».

Faire de l’école une maison commune entourée par des compagnons de destin n’est-ce pas là la visée originelle d’une société inclusive ? Faire corps au sein d’une société de pairs solidaires qui reconnaissent chacun sans l’assigner à sa différence, semble incarner l’aspiration de cette jeunesse à rompre avec les logiques d’indifférence à l’égard des publics en situation de handicap. L’institution scolaire porte donc une responsabilité fondamentale : créer des conditions permettant à tous les élèves de faire l’expérience du commun, dans tous les espaces de l’école et non uniquement dans la classe.

Penser « l’inclusion relationnelle » devient essentiel. Trop souvent, l’opinion publique évoque la défaillance technique là où l’aide humaine pourrait lever la difficulté d’accès. Anne-Lise Chabert le souligne avec acuité : « L’accès n’est pas qu’une une affaire de porte large ou de plan incliné, c’est une affaire humaine, d’accueil et d’équipe » (Marin, 2022, p.69).L’appropriation de l’école par les élèves ne peut advenir que si la communauté scolaire leur permet de résonner ensemble, entre « pairs-différents ». C’est en rendant possible cette expérience commune, fondée sur la reconnaissance réciproque et le partage de l’espace scolaire, que l’institution peut réellement s’affirmer inclusive. Le groupe ne naît pas d’un coup de baguette magique : il se tisse patiemment, se cultive et s’entretient jour après jour.

Dès lors, il appartient aux professionnels de l’Ecole de créer les conditions permettant aux élèves, notamment les plus vulnérables (Marsollier, 2023), d’initier les relations, et se positionner activement dans les dynamiques de groupe. Faire le pari du collectif au sein des divers espaces de l’école est un engagement fort pour la communauté éducative et un levier pour une société plus juste et égalitaire. Cette vision humaine de l’école doit s’incarner à travers de projets coopératifs enracinés dans le quotidien des collégiens afin de transformer l’environnement scolaire en un véritable lieu d’expérience partagée (Ebersold, 2017).

Les espaces interstitiels, lieux du lien par excellence, où se logent le cœur des émotions d’un établissement scolaire, mériteraient d’être davantage observés et orchestrés pour permettre à chacun de s’attacher socialement (Paugam, 2023). Alors, en faisant une place à l’autre, peut-être que les cartables les plus lourds s’allègeront permettant à tous les habitants de l’école de mieux y vivre. N’est-ce pas là le véritable défi d’une école réellement inclusive : favoriser des relations de qualité entre tous les élèves, dans tous les espaces de la communauté scolaire ?

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13-11-2025

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Comment citer

Poulelaouen, J. F., Zanna, O., & Mercier, C. (2025). Prendre place au collège : expériences relationnelles et participation sociale d’anciens élèves présentant une déficience visuelle . Revue Interdisciplinaire Sur Le Handicap Visuel, (2). https://doi.org/10.5077/journals/rihv.2025.e2297